Content is the new community : pourquoi le contenu est devenu la colonne vertébrale des communautés post-covid (en lieu et place des events)
Comment l'économie de l'attention a redéfini les règles du community building
1. "Community is the new media"
2. Les communautés événementielles post-COVID ont disparu
3. L'économie de l'attention millimètrée a tué les formats chronophages
4. Les communautés s'organisent en cercles concentriques (contenu → interactions VIP)
5. Il faut recruter des créateurs, pas des community managers classiques
6. L'audience fait partie de la communauté (fin de la distinction artificielle)
7. Les communautés viables sont des "communautés d'offre", pas de demande
L'époque des pizzas-bières et des meetups improvisés est révolue. Si vous dirigez encore votre communauté comme en 2018, vous naviguez à vue vers l'iceberg. Ce n'est pas une opinion : c'est un constat brutal que partagent aujourd'hui tous les leaders qui ont réussi la transition vers les nouvelles règles du community building.
La pandémie n'a pas seulement bouleversé nos habitudes de travail. Elle a provoqué une révolution silencieuse mais décisive dans l'économie de l'attention, redéfinissant pour toujours les standards d'engagement communautaire. Les organisations qui n'ont pas saisi cette mutation structurelle disparaissent une à une, laissant le terrain aux nouveaux acteurs qui ont compris une vérité fondamentale : dans l'économie moderne de l'attention, le contenu n'est plus un plus. C'est la devise de base de toute communauté viable.
L'effondrement du modèle événementiel traditionnel
Revenons aux faits. Avant 2020, la colonne vertébrale d'une communauté reposait sur les événements physiques. Conférences, meetups, networking : ces formats fonctionnaient parce que l'attention était moins disputée et que les alternatives étaient limitées. La crise sanitaire a créé un pic artificiel d'engagement vers les formats numériques. Tout le monde était confiné, les agendas vidés, l'attention disponible.
Cette période a généré une illusion d'optique majeure. Des milliers de communautés ont émergé sur Slack, Circle ou Discord, surfant sur cette vague d'attention exceptionnelle. N'importe quel format, n'importe quel contenu trouvait son public. C'était l'âge d'or apparent du community building numérique.
Puis la réalité a repris ses droits.
Les communautés qui n'avaient développé aucune stratégie de contenu documenté ont disparu sans laisser de trace. Celles qui avaient construit leur engagement uniquement sur des événements ponctuels ou des interactions éphémères se sont évaporées dès que l'attention s'est redistribuée vers d'autres priorités.
À l'inverse, les communautés qui avaient développé une approche média, qui avaient investi dans la création de contenu durable, qui avaient documenté leurs échanges et leurs expertises, sont non seulement toujours en vie aujourd'hui, mais prospèrent.
L'économie de l'attention millimètrée
Nous évoluons désormais dans un environnement où chaque seconde d'attention est disputée. Apple met en avant ses outils de mesure du temps d'écran. Les législateurs s'interrogent sur l'accès des mineurs aux réseaux sociaux. Les individus développent des stratégies défensives face au bombardement permanent de sollicitations.
Il y a encore peu de temps, on construisait des communautés en misant sur la spontanéité du contenu généré par les membres. On ouvrait un Slack, un Discord, un groupe WhatsApp, et on espérait que la conversation s’auto-alimente.
Mais en 2025, ce modèle s’essouffle.
Nous vivons dans une économie de l’attention saturée. Les gens n’ont plus 4 heures par semaine à consacrer à 10 groupchats. Ils n’ont pas plusieurs existences numériques à répartir entre autant de communautés. Ils font des choix. Et ils les font avec une lucidité redoutable.
Résultat : ils s’investissent à fond dans une ou deux communautés — pas plus — et ignorent toutes les autres.
Le rêve du contenu UGC autoportant, nourri par l’enthousiasme collectif, s’estompe. Parce qu’au fond, ce n’est pas "facile" ni "naturel" de poster, de répondre, de contribuer. Ce n’est pas du loisir. Ce n’est pas du divertissement. C’est une dépense cognitive.
Et aujourd’hui, cette dépense est rationnée. Ce que vous obtiendrez en engagement sera systématiquement au détriment d’un autre moment d’attention : Netflix, YouTube, lecture, repos… ou une autre communauté.
👉 Une communauté forte ne peut plus reposer sur l’idée que ses membres vont naturellement créer du contenu. Elle doit créer un cadre éditorial puissant, cohérent, qui donne envie aux membres de participer parce que le niveau est déjà là. Parce qu’on ne vient pas remplir un vide, mais s’insérer dans un récit, un style, une exigence.
La conversation spontanée est devenue un privilège, pas une garantie.
Dans ce contexte, proposer un "rendez-vous Zoom de 18h à 19h" relève de l'inconscience stratégique. Organiser un événement mensuel dans une capitale en espérant mobiliser une communauté dispersée revient à ignorer les nouvelles règles du jeu.
Nouveaux standards
Les standards d'exigence ont explosé. Nous sommes passés d'une époque où la page d'accueil Yahoo des années 2000 semblait normale à aujourd'hui où elle nous ferait fuir instantanément. L'UX et l'UI ont évolué, nos exigences aussi. Cette même révolution frappe maintenant le community building : les contenus communautaires doivent désormais rivaliser avec les standards YouTube et Netflix.Regardez les communautés qui fonctionnent aujourd'hui : elles sont structurées autour de podcasts vidéo avec une mise en scène digne de productions télévisées, de newsletters éditorialisées comparables à celles de médias établis, de contenus formatés selon les codes de l'entertainment moderne.
La leçon de l'économie des créateurs
Les entreprises qui réussissent leur transformation communautaire comprennent une vérité fondamentale : "Community is the new media." Cette réalité redéfinit complètement les règles du community building moderne.
Prenons l'exemple révélateur des entrepreneurs qui construisent leur communauté : ils ne commencent plus par créer un groupe Slack. Ils lancent d'abord un média - podcast, newsletter, série de vidéos - puis construisent leur communauté autour de ce hub de contenu. Le média devient la colonne vertébrale, la communauté en découle naturellement.
Cette approche fonctionne parce qu'elle respecte les nouvelles attentes : les membres viennent chercher/vérifier la preuve de la valeur avant de chercher de la connexion. Ils veulent d'abord apprendre, découvrir, progresser. Les relations se construisent ensuite, sur cette base de valeur partagée.
Redéfinir les compétences du community building
Cette mutation impose une révision complète des profils recherchés. Recruter un community manager sur les compétences d'animation Discord ou d'organisation d'événements relève aujourd'hui de l'erreur de casting.
Un community builder moderne est avant tout un créateur de contenu. Il maîtrise l'édition vidéo, comprend les subtilités du SEO et du GEO (Generative Engine Optimization), sait créer des newsletters engageantes, produit des podcasts de qualité professionnelle. Il utilise l'intelligence artificielle pour accélérer sa production tout en maintenant un niveau éditorial élevé.
Ces compétences ne sont plus optionnelles. Elles constituent le socle minimum pour espérer capter et retenir l'attention dans l'écosystème actuel.
La stratégie des cercles concentriques
Cela ne signifie pas la mort des interactions humaines directes. Les masterminds, le matchmaking, les rencontres en petit comité conservent leur valeur. Mais leur positionnement a fondamentalement changé.
Ces formats intensifs et chronophages ne peuvent plus servir de porte d'entrée. Ils deviennent des privilèges réservés aux membres les plus engagés, ceux qui ont déjà démontré leur investissement à travers leur consommation et leur contribution au contenu communautaire.
La communauté s'organise désormais en cercles concentriques : le contenu one-to-many forme le cercle externe, accessible à tous. Les interactions personnalisées constituent les cercles internes, réservés à ceux qui ont prouvé leur engagement. Cette hiérarchisation permet d'optimiser les ressources tout en maintenant la qualité des expériences proposées.
Cercle "Netflix" (contenu one-to-many) - accessible à tous : podcast hebdomadaire, newsletter, articles de blog, webinaires gratuits, contenus LinkedIn
Cercle "Whatsapp" - membres actifs : Slack privé, Q&A mensuels, contenus exclusifs, early access aux ressources
Cercle d'affaires - super-engagés : masterminds trimestriels, dîners en petit comité, accès direct au fondateur, co-création de contenus, de leads, d'intérêts.
Cette hiérarchisation permet d'optimiser les ressources tout en maintenant la qualité des expériences proposées. Le contenu nourrit tous les niveaux, mais l'accès aux interactions humaines se mérite par l'engagement démontré.
Au-delà de la distinction audience/communauté
L'une des erreurs conceptuelles majeures du community building traditionnel consiste à opposer audience et communauté. Cette distinction artificielle nuit à la compréhension des dynamiques réelles.
L'audience fait partie de la communauté. Elle représente simplement le niveau d'engagement le moins actif. Mais elle demeure un élément constitutif de l'écosystème global. Traiter différemment les "simples" consommateurs de contenu et les membres "actifs" revient à créer des silos contre-productifs.
Les leaders communautaires qui réussissent animent l'ensemble de leur écosystème avec la même approche média, en proposant différents niveaux d'accès et d'exclusivité selon l'engagement de chacun.
La communauté comme écosystème d'affaires
Cette approche répond à une réalité économique fondamentale : les communautés viables sont des communautés d'offre, pas de demande. Elles rassemblent des acteurs qui ont intérêt à collaborer, à créer ensemble, à amplifier mutuellement leur portée.
Le contenu devient alors la monnaie d'échange de cet écosystème. Les membres les plus actifs co-créent des livres blancs, participent à des podcasts croisés, développent des partenariats éditoriaux. Cette dynamique génère une valeur décuplée par rapport à ce que chacun pourrait accomplir individuellement.
Recommandations stratégiques
Pour les dirigeants qui souhaitent développer ou relancer leur communauté, trois actions prioritaires s'imposent :
1. Investir massivement dans les compétences de création de contenu. Recrutez des profils hybrides community/content, formez vos équipes aux outils de production moderne, développez une ligne éditoriale distinctive.
2. Adopter une approche média-first. Avant de créer votre Slack ou votre Discord, lancez votre podcast, votre newsletter, votre série de contenus. La plateforme communautaire viendra ensuite, naturellement.
3. Repenser votre stratégie d'engagement. Abandonnez les formats chronophages en porte d'entrée. Réservez-les aux membres les plus investis. Concentrez vos efforts sur la production de contenu de qualité, accessible et régulier.
Le community building moderne n'est plus un dérivé du marketing traditionnel. C'est devenu une discipline à part entière, qui emprunte ses codes à l'industrie des médias et ses méthodes à l'économie des créateurs. Les organisations qui intègrent cette réalité prennent une longueur d'avance décisive. Les autres risquent de rejoindre le cimetière des communautés perdues dans la transition post-COVID.
Le contenu n'est plus l'avenir des communautés. C'est leur présent.
Une proposition concrète
Je vous propose quelque chose de simple cette semaine : 🗓 Mercredi 10 juillet, j'ouvre ma journée pour des échanges en tête-à-tête de 30 minutes.
Pas de programme imposé. Juste un moment pour vous aider concrètement sur :
un sujet tech ou IA que vous explorez,
une idée de contenu ou de format à tester,
une communauté que vous animez (ou voulez lancer),
ou simplement pour prendre du recul et discuter ensemble.
C'est ouvert à toutes les personnes de cette liste, sans conditions. Premier arrivé, premier servi.
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À très bientôt, Alexandre